mercredi 6 novembre 2013

Madagascar: les jeunes femmes, premières victimes de la crise

mis à jour le
Elève d'une école coranic en  Sierra Leone,  REUTERS/Finbarr O'Reilly
Elève d'une école coranic en Sierra Leone, REUTERS/Finbarr O'Reilly


A Madagascar, celles qui paient les conséquences de la crise, sont les jeunes filles. Entre les viols et les diverses agressions, elles doivent vivre dans un climat d’insécurité permanent.


Alors que le site du Quai d'Orsay révèle que le pays figure parmi les Etats les plus pauvres au monde, (151ème place sur 187 selon l’Indicateur de développement humain PNUD 2011), Madagascar doit faire face aux conséquences de la crise économique qui frappe les jeunes femmes. Dans un pays où 76% de la population vit sous le seuil de pauvreté, le nombre d’agressions sexuelles et de prostitués a fortement augmenté, relaie le site de la chaîne qatarie Aljazeera.
«Même s’il y avait des viols de jeunes filles et même de bébés avant le coup d’état, cela restait exceptionnel. Mais maintenant les choses sont différentes», explique une productrice locale.
De plus, les coupables ne sont pas toujours condamnés, rappelle la ministre de la Justice Nadia Rakotomala. Les victimes ne portent pas toujours plainte. C'est pourquoi il est difficile de chiffrer avec exactitude l'évolution de ce phénomène:
«Ils ne sont pas systématiquement signalés, les gens ne considèrent pas cela comme un crime. Mais ils considèrent cela comme une activité commerciale et culturelle normale».
Pour éviter que leurs enfants soient victimes d’agressions ou se prostituent, certains parents ont trouvé une alternative: ils marient leurs filles dès l’âge de 12 ans.  Ne pouvant pas subvenir à leurs besoins, les familles perçoivent la dot fournie en bétail ou en monnaie. Comme une bouée de sauvetage sur laquelle ils peuvent se reposer un certain temps.
Cette pratique est courante dans les campagnes et dans certaines grandes villes de l’île, même si la loi interdit les mariages de personnes de moins de 18 ans depuis 2007. Selon Afrik.com qui a interrogé Esther Volonan, présidente de l’association Avenir (qui lutte contre toutes formes d’injustice à Madagascar), ce texte n’a pas éradiqué les mariages précoces.
«Des milliers de jeunes filles sont forcées de se marier très tôt… Dans les campagnes c’est une coutume », affirme la militante.
Autre alternative, le placement des jeunes filles dans des maisons d'accueil au village. C’est un endroit où elles vivent en communauté en attendant de décider ce qu’elles vont faire plus tard. Une maison de transition à mi-chemin entre la tutelle parentale et l’indépendance. Toutefois, c’est souvent le dernier rempart avant l’exploitation et la prostitution.
A l’approche du second tour de l'élection présidentielle, prévu le 20 décembre, le pays demeure en suspens : si le résultat de cette élection qui oppose Jean-Louis Robinson et Hery Rajaonarimampianina est accepté sans violence, Madagascar devrait retrouver son climat paisible, ainsi que les nombreuses donations suspendues après le coup d’état de 2009.
Lu sur diplomatie.gouv.fr, Aljazeera, Afrik.com

Révolte des femmes soudanaises : Ils peuvent nous battre mais ils ne nous briserons pas !


Hala Alkarib

2013-11-02, Numéro 301



cc CRS
L’islam politique au Soudan reste puissant et se manifeste par la flagellation des femmes, pratique justifiée dans la Constitution par l’Indecent and Immoral Act. Malgré tout, les femmes soudanaises restent défiantes et résistent à ces lois misogyne et injustes.
Après des années d’injustices, la colère monte au Soudan où les manifestants pacifiques sont blessés et tués par les forces du régime soudanais. Le Soudan a été exposé à la brutalité de l’idéologie dogmatique de l’islam politique et la population a été dépouillée de sa dignité. Cette histoire n’est que la pointe de l’iceberg. Les femmes soudanaises sont le reflet de la cruauté et de la disparité imposées par le régime au pouvoir.

Depuis 25 ans, des femmes sont flagellées publiquement. L’idéologie de l’actuel régime soudanais était claire dès le premier jour : terroriser les femmes ce qui équivaut à paralyser toute la nation. Comme tous les dogmes dans l’islam politique, le régime a estimé que le moyen de garantir sa position passait par le contrôle du corps, de l’esprit, de l’existence des femmes et de leurs interactions publiques. Son idéologie misogyne se fonde sur la notion selon laquelle les femmes sont un problème et doivent être disciplinées et contrôlées, que les femmes sont à la fois dangereuses et les principales instigatrices de l’immoralité, responsables de tous les maux de la société. Donc on doit leur dire comment se comporter en public.

CRIMINALISER LES FEMMES POUR JUSTIFIER LA MISOGYNIE

"Ce n’est pas suffisant de leur parler. Nous devons les punir et instiller la peur dans leur esprit parce qu’elles ne sont pas intelligentes et pas à la hauteur sur le plan spirituel. Leur père et leur mari sont incapables de les contrôler". Voilà ce qui sous-tend l’article 152 du Code pénal soudanais, l’Indecent and Criminal Act, sur la base duquel Amira Osman, une militante soudanaise, a été traduite en justice, et par lequel des milliers de femmes pauvres et invisibles ont déjà été jugées, condamnées et flagellées publiquement. Leur rire est considéré comme un crime, leur présente provoque le péché.

C’est ainsi que le régime a vaguement élaboré l’article 154 du Code pénal : "Pratiquer la prostitution". L’article définit "qu’un endroit de prostitution est un endroit destiné à réunir des hommes et des femmes entre qui il n’y pas de relations maritales, de famille, dans des circonstances dans lesquelles l’acte sexuel va probablement être commis". Des centaines de femmes sont accusées suivant cet article, à l’intérieur de leur maison ou à leur place de travail. L’interprétation de cet article permet effectivement d’accuser des femmes dans tout lieu public où elles peuvent se trouver dans la même pièce qu’un homme avec lequel elles ne sont pas apparentées.

Le crime de "possession de matériels et de démonstration contraire à la moralité publique" de l’article 153 a exposé des milliers de jeunes femmes à la folie de la police des mœurs et les a privées d’une vie simple et digne. Les lois concernant l’ordre public au Soudan sont rédigées de façon suffisamment vagues et élusive pour permettre aux juges et aux forces de maintien de l’ordre de faire usage de leur propre interprétation des lois. Ceci a fait du système légal une machinerie qui sert certains intérêts, avec des lois manipulées et tordues contre la présence des femmes et leur participation aux affaires publiques.

Sara, âgée de 25 ans, est une artiste et une enseignante dans une école privée. Au début de cette année, alors qu’elle rentrait chez elle, elle a été arrêtée et emmenée sur ordre de la police. Elle portait un pantalon et un T-shirt à longues manches. Elle a été sexuellement violentée, humiliée et ensuite accusée sous l’article 152 parce qu’elle portait un pantalon. Selon son récit, lorsque la police l’a arrêtée et emmenée, il y avait déjà douze autres femmes dans le véhicule, qui toutes circulaient sur la voie publique, et qui ont été arrêtées au hasard par la police des mœurs. Aucune d’entre elles n’avait commis le moindre crime, juste marchaient-elles le long de la route, s’occupant de leurs propres affaires. Elles ont été détenues pendant 24 heures. On leur a enlevé leur téléphone. Au matin le juge les appelé par leur nom et lorsque Sara fût appelée, le juge lui a demandé "quarante coups de fouet ou payer 1000 Sdp ?" Elle a dit qu’elle n’avait que 10 livres et alors le juge a crié "40 coups de fouet" et les soldats l’ont empoignée. Ils l’ont emmenées dans une cour à l’intérieur du bloc de détention, l’ont fait s’asseoir sur le sable et ont commencé à la flageller. "Après dix coups de fouets extrêmement douloureux, j’étaos insensible et je pouvais seulement entendre les moqueries et les rires des soldats qui traînaient par là et qui demandaient qu’on me batte plus fort", a-t-elle rapporté.

BATTRE LES FEMMES POUR BRISER LEUR RESISTANCE

Halima, âgée de 44 ans, distille de l’alcool localement et le vend à des hommes dans tout Khartoum. Elle est le gagne-pain de sa famille de six enfants et de deux vieux parents. Tous dépendent d’elle. Elle a dit qu’elle a été flagellée et emprisonnée maintes fois ," et chaque fois qu’ils viennent, ils confisquent l’alcool, le revendent à des clients ou le boivent. Ils me battent pour l’avoir fait".

LES MORTS SONT PLUS PUISSANTS QUE LES VIVANTS.

Amena. Agée de 56 ans, vendait du thé à côté de l’hôpital. Elle raconte : "Ils passent leur temps à prendre ma bouilloire et mes tasses. Parfois ils me flagellent et si j’ai un peu d’argent je leur le donne. Ces jours j’ai trouvé un emplacement à côté du cimetière pour vendre mon thé. J’ai toujours des clients mais la police m’approche rarement. Je crois que les morts sont plus puissants que les vivants dans notre pays".

Les histoires de ces femmes sont le reflet plus ou moins de la vie de millions de femmes au Soudan

ELLE AVAIT OMIS DE COUVRIR SES CHEVEUX

Des centaines de femmes sont venues assister au procès d’Amira Osman, une militante soudanaise accusée sous l’article 153 pour n’avoir pas recouvert ses cheveux d’un foulard. Son procès a maintenant été repoussée jusqu’au 4 novembre 2013. Ces femmes n’abandonneront pas leur humanité et leur dignité malgré la menace de flagellation suspendue au-dessus de leur tête.

La bataille contre le régime de l’ordre public soudanais, qui a infiltré le Code pénal du pays, a cours depuis des années dans tout le pays. Il a été utilisé pour réprimer les femmes, pour compromettre leurs moyens de subsistance, pour les appauvrir, pour limiter leur participation à la vie publique, aux sports, aux activités culturelles et leur mobilité ainsi que leur participation politique. Les lois discriminatoires soudanaises et le régime d’ordre public affectent les communautés pour les générations à venir en imposant la subordination des femmes dans l’esprit des jeunes générations et donc inhibe le potentiel de progrès et de paix


CE TEXTE VOUS A ETE PROPOSE PAR PAMBAZUKA NEWS



 

An interview with Nadifa Mohamed: “I don’t feel bound by Somalia…but the stories that have really motivated me are from there”

By Magnus Taylor




NadifaMohamed
Nadifa Mohamed: “I wanted [in this book] to sink deeply into a small thing.”
Nadifa Mohamed is a writer with a growing reputation as a powerful and poetic literary voice within the global Somali diaspora. Born in Hargeisa – the present-day capital of Somaliland – in the early 1980s, she left during the civil war when “the city wasn’t really functional – it was blacked-out and curfewed (but I don’t remember that).” This year she was nominated as one of Granta’s ‘Best of Young British Novelists’, her first novel, ‘Black Mamba Boy’ was shortlisted for The Guardian First Book Award.
Whilst most contemporary writing about Somalia focuses on the war, Mohamed’s recently published ‘The Orchard of Lost Souls’ is much more than just an account of violence and suffering.
Says Mohamed: “even if there’s a conflict people are still trying to live as normal lives as they can…despite the suffering that hits when the war breaks out, they are still pretending as far as they can that their lives are going to be the same as they expected them to be… people are not overwhelmed by conflict.”
To this end, Mohamed’s latest novel is a close-up portrayal of three women – Kawsa, Deqo and Filsan – whose lives intersect, diverge and then intersect again during a few weeks in 1987. It’s the eve of the Somali civil war and the rebels are closing in around Hargesia – the atmosphere is both febrile and yet, as Mohamed describes, profoundly normal.
Hargeisa was then something of a backwater in the larger Somali Republic ruled from cosmopolitan “Mogadishu the beautiful” with its “white-turbaned mosques, baskets of anchovies as bright as mercury [and] jazz.” Mohamed tells me that power was so concentrated in the capital that no building of more than 2 stories was permitted outside of Mogadishu – something that has made it such a political prize for those who have fought over it for the last 20 years.
But Mohamed speaks of Hargeisa with great affection, as a place in which she feels safer than in London. Indeed, Hargeisa is famous for its safe streets and low level of crime – money changers sit fearlessly behind huge piles of notes unprotected on the roadside and a gold market casually operates in the middle of town: “these feel like secrets, like secrets only people from those places know.”
Mohamed’s three main protagonists first meet in the city at a giant public rally on the anniversary of the country’s independence. The face of the President appears, Big Brother-like, constructed from placards held up by the crowd to become “a giant, a God who watches over them, who can dissolve into pieces and hear and see all that they do.” However, it’s what the state cannot control – the thoughts, feelings and personal relationships between ordinary people – that Mohamed is really interested in. Specifically, she wants to sink deeply into the minds of Somali people – so often overlooked as an undifferentiated mass of suffering and victimhood.
Kawsar – an old, rebellious widower – saves Deqo, a street girl, from a beating at the hands of a group of female government informers and enforcers (The Guddi). This results in Kawsar’s arrest by the police and subsequent beating after an interrogation by Filsan – a female soldier and daughter of a senior army officer – which leaves her bed-bound with a broken hip. Rather than becoming a story of the war, the book becomes a study of what goes on in the minds of these three characters.
Apart from a brief description of the fighting experienced by Filsan towards the end of the book, Mohamed seems to deliberately eschew the potentially dramatic episodes in the war. This could have included the levelling of Hargeisa by government planes or as Richard Dowden describes, the almost “biblical exodus”, when the entire remaining population of the city left and walked to Ethiopia. But Mohamed says this “would have drawn me away from what I really want to talk about – which was what was going on in people’s minds… I wanted [in this book] to sink deeply into a small thing.”
I ask Mohamed whether she will ever try to write a story from a different, non-Somali perspective: “My (personal) story starts in Somalia, so that’s where my books come from. But I don’t feel bound by Somalia…but the stories that have really motivated me are from there.”
She adds that “So many things are written about Somalis, but so few things are written by them…it also feels like an opportunity to set the record straight.” So in a sense Mohamed’s writing is political – an attempt to give a voice to those so infrequently portrayed in literature. And as she adds, it is “about discussing power and powerlessness…in a place that is seemingly always in flux, like Somalia, this becomes much more apparent.”
As one of a growing number of Somali diaspora writers, Mohamed enjoys the benefits of time, space and security that most of the current population of the country do not have. This perhaps explains why nowadays most of the best Somali literature is coming from outside the country.
But counter to plenty of conventional commentary, Mohamed doesn’t agree that the future of Somalia is in the hands of the diaspora:
“Diasporas can be quite dangerous”, she says “they can have quite a distorted view of their homeland. And they can come with a kind of sense of ownership – an almost colonial-type attitude.”
She also bemoans the fact that those sitting outside the country have “tried to say that there are just these big clans, and that’s who Somalia belongs to, and they’re all men and they’re all the same. But I don’t think they own Somalia – people like Kawsa own Somalia, people like Filsan’s maid. This is their home.”
In ‘The Orchard of Lost Souls’ Mohamed reminds us that amidst all the pain and suffering of war ordinary lives persist and not everyone is desperate to flee.
Magnus Taylor is Editor of African Arguments.